Publié le 04/12/2023

Parution avec l’aimable autorisation d’AEF

Tête de réseau des Missions Locales dans la région Hauts-de-France, l’Arefie fait de l’amélioration de l’état de santé des jeunes suivis dans ces structures une priorité. L’enquête qu’elle a menée sur le sujet en 2020 auprès de 2 000 jeunes issus de 25 missions locales a mis en évidence les effets de la précarité sur leur santé : moindre recours aux soins, alimentation peu équilibrée, consommation de tabac et de cannabis, moindre utilisation des contraceptifs… Un quart des jeunes présentait un état de souffrance psychique « modéré » et 5 % un état de dépression.

« La multiplication des crises, du Covid à l’inflation, nous amène à prêter une attention particulière à la santé mentale », indique Zohra Boukabous, directrice de l’Arefie, jointe mi-novembre 2023 par AEF info. C’est le sens de la convention qui vient d’être signée avec l’agence régionale de santé : au total, 39 Missions Locales pourront bénéficier de la présence hebdomadaire d’un psychologue – au lieu de 13 précédemment. Un poste va être créé au sein de l’Arefie pour suivre ce déploiement, en plus des deux postes de chargés de mission sur la santé, l’accès aux droits et la prévention.

Dans l’Oise, la lutte contre l’isolement

Située en territoire rural, la Mission Locale de Saint-Just-en-Chaussée (Oise) accompagne plus d’un millier de jeunes dans une centaine de communes. Elle a mis en place de 2014 à 2017 un « point écoute santé » hebdomadaire grâce à une subvention du conseil régional. « Cela a été très utile parce que nous n’avions pas grand-chose à proposer aux jeunes addicts ou en souffrance », estime Ahmed Kassim Isse, son directeur. « Hélas nous avons dû arrêter pendant un an en raison de l’arrêt du financement par la région. Heureusement, nous bénéficions depuis 2018 de la mise à disposition par l’Arefie d’une psychologue une fois par semaine ».

Cette psychologue reçoit en consultation des jeunes qui souffrent souvent de solitude. « L’absence de transports en commun est le manque le plus criant sur ce territoire », souligne Ahmed Kassim Isse. « Ici, l’abribus sert surtout de point de rencontre pour des jeunes désœuvrés ». La Mission Locale tente de pallier ce problème de mobilité en proposant de l’autopartage et des cours (code et permis de conduire scooter) dans son auto-école sociale. Elle a aussi acheté un minibus de 9 places et une petite voiture pour aller chercher ceux qui n’ont pas de solution de transport. « Nous faisons le nécessaire pour sortir les jeunes de l’isolement », explique le directeur.

« Pendant le Covid, les conseillers ont gardé le contact, au téléphone ou en visio, avec les jeunes », rappelle Ahmed Kassim Isse. « Pour les jeunes qui ont traversé la crise tout seuls, parce qu’ils n’étaient pas inscrits en Mission Locale, cela a été plus compliqué, jusqu’à mener à des dépressions ». La possibilité de consulter une psychologue représente parfois pour eux une bouée de sauvetage.

A Arras, « Les plannings sont déjà pleins »

La maison de l’emploi et des métiers d’Arras (Pas-de-Calais) suit, dans son activité de Mission Locale, près de 3 000 jeunes sur un territoire à la fois urbain et rural. Elle a bénéficié, de 2000 à 2015 environ, d’un demi-poste de psychologue mis à disposition par le centre hospitalier d’Arras puis de 2020 à 2022 d’une permanence d’un psychologue une demi-journée par semaine grâce à un financement de l’ARS. Ce dernier est parti exercer en libéral en décembre, laissant un grand vide : « Nous avons été fort démunis : nous avions peu de solutions à proposer, les rendez-vous au CMP étant éloignés dans le temps », témoigne David Malbranque, chargé de projets sur la santé.

Cette période est terminée puisqu’une psychologue a rejoint l’équipe à compter du 10 octobre. Rémunérée grâce au partenariat ARS/Arefie, elle assure une permanence chaque mardi : le matin à Arras, dans l’espace occupé par les conseillers CEJ, et l’après-midi en alternance dans trois autres communes. Les jeunes prennent rendez-vous de manière spontanée ou sont orientés par leur conseiller. D’autres viennent à l’invitation du foyer de jeunes travailleurs, de Pôle emploi ou de l’AFP2I, un organisme de formation.

« On a démarré il y a un mois à peine et les plannings sont déjà pleins », souligne David Malbranque. « La période du confinement a vraiment créé du mal-être », détaille-t-il. « Nous voyons aussi apparaître de nouvelles problématiques autour du changement de genre, des violences faites aux femmes et des violences intrafamiliales. » Les jeunes suivis à Arras sont aussi très touchés par l’attentat qui a coûté la vie le 13 octobre à un professeur de la cité scolaire Gambetta-Carnot, Dominique Bernard. « Émilie, notre psychologue, me dit qu’elle ne fait quasiment pas un entretien sans que les jeunes lui en parlent », relate David Malbranque.

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