Publié le 23/06/2021

Un article d’Alexandra Turpin, AEF, repris avec leur aimable autorisation.

AEF info : Les mesures d’assouplissement de la Garantie jeunes sont désormais effectives. Le décret renforçant les prérogatives des Missions Locales sur la Garantie jeunes a été publié au Journal officiel fin mai 2021. Une note de la DGEFP détaille les mesures. Est-ce que vous êtes satisfaits ?

Nous avions demandé ces assouplissements. Au moment où le gouvernement a annoncé l’augmentation des objectifs de Garantie jeunes, nous avions fait savoir que nous rencontrions des difficultés. Certains jeunes, qui en avaient besoin, ne pouvaient pas accéder à la Garantie jeunes, à cause de critères qui ne semblaient pas adaptés.

Nous avons été entendus sur la plupart de nos demandes. L’assouplissement principal est lié à la résidence fiscale du jeune. Un jeune en rupture avec ses parents, peut être admis à entrer en Garantie jeunes sans s’engager à se déclarer fiscalement autonome. Jusqu’ici, certains jeunes étaient exclus alors qu’ils ne recevaient pas de ressources de leurs parents.
Il y a, aussi, deux autres assouplissements. L’un concerne la durée des parcours, avec la possibilité de prolonger et moduler plus facilement la Garantie jeunes. L’autre permet un assouplissement pour les jeunes qui ont des petits boulots. Certains jeunes ne pouvaient pas, jusque-là, intégrer la Garantie jeunes car ils avaient un peu trop travaillé, sans pour autant avoir trouvé une situation stable.

Sur quels points estimez-vous qu’il aurait fallu aller plus loin ?

Nous avions demandé encore plus de souplesse, pour laisser complètement la main au conseiller de faire entrer un jeune si le conseiller l’estime nécessaire. Par exemple, un jeune qui aurait dépassé un certain nombre d’heures d’emploi. Plus le conseiller a de souplesse, mieux c’est.

Mais nous sommes très contents. Ce n’est pas un reproche. La Garantie jeunes représente de l’argent public. Cela se comprend aussi.

Est-ce que ces assouplissements vous permettront d’atteindre les 200 000 jeunes, conformément aux objectifs fixés ?

Aujourd’hui, nous sommes sur une trajectoire qui nous permet d’envisager d’atteindre l’objectif de 200 000. Nous avons eu des difficultés à recruter des conseillers, à trouver des locaux et nous avons réussi.

Toutefois, il faut prendre en compte deux réalités. Nous rentrons dans une période estivale où il est plus compliqué d’intégrer des jeunes. Les jeunes ne pensent pas forcément tout de suite à chercher du travail ou à entrer en formation.

D’autre part, nous observons dans certains secteurs ou territoires une reprise d’activité. C’est une bonne nouvelle car il y a une reprise des offres d’emploi. Cela permet de trouver des solutions plus facilement que nous aurions pu le penser il y a quelques semaines. Si cela se confirme, nous n’aurons peut-être pas besoin immédiatement d’activer des dispositifs de Garantie jeunes avec les volumes que nous pensions activer. Ce serait très bien pour les jeunes car cela veut dire qu’ils ont trouvé du travail.

Vous évoquiez des difficultés à trouver des locaux. Ces questions sont réglées ?

Nous avons surmonté les difficultés dans une très large majorité des cas. Il reste des zones de tension dans certains territoires, notamment dans ceux très urbanisés. Les locaux sont chers et exigent des engagements de longue durée. Il y a une réticence des Missions Locales à aller sur des baux de longue durée car elles ne sont pas certaines que le dispositif va perdurer dans le temps. Il y a un risque financier.

Des Missions Locales de zones rurales ont aussi des difficultés pour trouver des locaux qui soient disponibles et de taille suffisante pour accueillir des groupes. L’assouplissement des conditions d’accueil des jeunes, avec l’évolution des règles sanitaires, devrait faciliter les choses. Nous ne devrions plus avoir ces problèmes de locaux dans les semaines qui viennent.

Où en êtes-vous du recrutement des 2 000 conseillers ?

Cela dépend des territoires. 80 % de nos structures ont réussi à trouver et embaucher les conseillers dont elles ont besoin. Il reste, toutefois, des territoires où c’est plus difficile. Il y a des raisons diverses et variées. Notamment, nous cherchons des conseillers qui ont une compétence, une fibre sociale, une connaissance territoriale, une connaissance de l’ESS. Il n’est pas forcément évident de trouver partout ces profils, notamment dans les zones les plus rurales.

Cela va être surmonté d’ici le début du mois de septembre. Nous devrions alors avoir nos effectifs de 2 000 conseillers.

Les Missions Locales ont alerté sur le fait que les budgets arrivaient tard. Qu’en est-il pour cette année ?

Pour la Garantie jeunes, nous avons eu les financements plus tôt que d’habitude. Il y a toujours un décalage entre les exigences de démarrage des dispositifs et les financements. Mais les ministres, Élisabeth Borne et Brigitte Klinkert, ont tout fait pour que les financements puissent être donnés rapidement. Les financements sont garantis pour les 150 000 premières Garantie jeunes. Cela crée un climat de sérénité pour déployer les moyens humains et matériels. Nous avons, aussi, eu connaissance des règles de financement des 50 000 dernières Garantie jeunes. Nous sommes confiants sur la mise en œuvre.

Pour les autres lignes budgétaires, ce sont les mêmes règles que d’habitude, avec parfois les mêmes problèmes. Il y a globalement un effort très important du ministère et de la DGEFP pour que les financements arrivent plus vite et de manière plus sereine pour les Missions Locales.

Selon les informations du quotidien Les Échos, Pôle emploi réclame un renfort de 1 500 conseillers en CDI pour déployer la Garantie jeunes universelle auprès des jeunes travailleurs précaires. Quelle place pour les Missions Locales ? Comment réagissez-vous ?

C’est un article qui a été beaucoup commenté. Je ne veux pas préjuger des décisions qui seront prises mais cela ne correspond pas aux discussions que nous avons eues. Le gouvernement conduit un excellent travail collaboratif et nous sommes très impliqués. Les Missions Locales seront partie prenante et totalement intégrées au dispositif.

J’ajoute que nous avons un bon partenariat avec Pôle emploi, au niveau local et au niveau national. Nous devons être unis et non pas l’un derrière l’autre ou l’un devant l’autre.

Quels contours devrait, selon vous, prendre cette « Garantie jeune universelle » ?

Nous avons plusieurs niveaux de discussion. Nous avons, d’abord, estimé le nombre de jeunes qui étaient les plus en fragilité sociale et financière. Cela représente environ 150 000 ou 200 000 jeunes, qui sont les plus prioritaires.

Mais nous pensons également un dispositif qui pourrait nous permettre de toucher l’ensemble des jeunes en Pacea. Cela nous satisferait encore plus. Cela permettrait à tous les jeunes qui en ont besoin de bénéficier d’un accompagnement et d’une indemnité, pour se projeter correctement dans un projet personnel de formation et d’insertion. Plus on touchera de jeunes, mieux ce sera.
L’important est aussi d’avoir la capacité de faire un accompagnement intensif. Nous souhaitons maintenir le niveau de qualité de la Garantie jeunes actuelle, avec un conseiller pour 50 jeunes environ.

Comment se passent les relations avec Pôle emploi ? En particulier en lien avec l’AIJ (Accompagnement intensif jeunes) ?

Cela dépend des territoires. Dans beaucoup de territoires, cela se passe très bien. Dans mon territoire, par exemple, nous arrivons à travailler de manière intelligente. Quand Pôle emploi a besoin de l’expertise de la Mission Locale, l’opérateur nous sollicite. Et inversement.

Il y a des territoires avec des difficultés voire des tensions. Cela reste minoritaire, local et souvent lié à des problèmes d’incompréhension qui existent depuis longtemps. Avec Jean Bassères [le directeur général de Pôle emploi], nous voulons faire passer le message à l’échelle nationale, pour qu’il y ait une vraie complémentarité.

Comment se déroule l’activité des Missions Locales depuis le 9 juin 2021 ?

Il faut rappeler que le réseau a tenu à assurer un accueil présentiel, notamment pour les jeunes en urgence. Je suis très content que nous ayons pu le faire. Nous avons poursuivi notre travail, en étant le plus proche possible des attentes des dispositifs tout en respectant les consignes sanitaires. Les accueils collectifs ont été préservés le plus possible dans le cadre de la Garantie jeunes.
Depuis le 9 juin, les règles se sont assouplies. Nous retrouvons un travail plus normal avec distanciation et masques bien sûr. Nous avons des discussions au niveau national et local sur le télétravail comme de nombreuses entreprises en France. Depuis le début de la pandémie, de nouvelles méthodes ont été mises en place, de nouvelles solutions. Cela fait l’objet d’une négociation.

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