Mercredi 21 juin, l’Union Nationale des Missions Locales, a organisé, avec l’appui d’Agnès CANAYER, sénatrice et vice-présidente de l’Union, une rencontre avec Pascale GRUNY, la sénatrice de l’Aisne rapporteure sur le projet de loi “pour le plein emploi”, avec une délégation composée de membres du Bureau de l’Union Nationale et de représentants des Associations Régionales des Missions Locales. Les sénatrices, Marta DE CIDRAC et Dominique ESTROSI SASSONE, toutes deux présidentes respectivement des Missions Locales de Saint-Germain en Laye et de Nice ont également participé aux échanges.
A l’occasion de ce dîner, Stéphane VALLI, président de l’UNML, et les participants ont commencé par réaffirmer les fondamentaux du réseau des Missions Locales et défendre ses convictions concernant la mise en œuvre de France Travail issues d’une phase de concertation interne des Missions Locales voulue par les instances.
1. Les Missions Locales, un modèle de réussite de décentralisation fondé sur l’autonomie stratégique et partenariale au plus près des réalités des territoires.
Pour conserver son agilité territoriale, ce véritable service public territorialisé et partenarial de l’insertion des jeunes demande à ce que son autonomie d’action soit préservée. Les Missions Locales sont, depuis 40 ans, le carrefour des politiques publiques nationales et territoriales à destination des jeunes. Chaque niveau de l’action publique nourrit leurs offres de services de façon à garantir le droit à l’accompagnement des jeunes et faciliter leurs accès aux droits. Les gouvernances associatives réunissent en leurs seins les partenaires publics, économiques et associatifs du territoire pour favoriser une bonne coordination des interventions de chacun au bénéfice des jeunes et des employeurs.
2. L’approche globale de l’accompagnement, la marque de fabrique du réseau des Missions Locales.
Le réseau des Mission Locale se réjouit que France Travail entende généraliser à l’ensemble des publics l’approche globale de l’accompagnement qu’il met en œuvre depuis 40 ans auprès des jeunes. Cette méthode originale consiste à accueillir et reconnaître les individus dans leur entièreté. Si la question de l’emploi et de l’activité est essentielle pour une insertion durable dans la société, pour les publics les plus éloignés, il est nécessaire d’effectuer un travail préalable pour créer les conditions favorables à leur insertion sociale, citoyenne et professionnelle durables dans la société.
3. Garantir la libre adhésion des jeunes et choix de leur accompagnateur.
Le premier enjeu est de réussir à établir une relation de confiance de façon à créer un cadre d’échange sincère où les personnes ne se sentent pas en permanence jugées ou contrôlées. C’est uniquement quand ce « terrain sincère » existe que nous pouvons vraiment avancer dans la relation d’accompagnement. Trop souvent, elles ont perdu confiance en elles et dans leurs capacités. Notre travail est de les convaincre que toutes et tous ont du talent et qu’ils sont capables de réussir si on leur donne et s’ils s’en donnent les moyens.
4. L’inscription à France Travail des jeunes accompagnés par les Missions Locales doit être réservée à ceux qui sont en recherche d’emploi.
Les Missions Locales, bien qu’elles jouent un rôle décisif sur l’accès à l’emploi des jeunes, travaillent également, notamment dans le cadre de l’obligation de formation, à prévenir le décrochage scolaire et à encourager la reprise d’étude. Elles accompagnent également des jeunes dans l’emploi. Elles apportent également des appuis ponctuels à des jeunes et animent des dispositifs locaux qui n’ont pas pour finalité première l’emploi notamment en termes de logement, de mobilité ou d’accès à la culture.
5. Renforcer la complémentarité entre les opérateurs de France Travail en reconnaissant la place et les expertises de chacun et en évitant la mise en concurrence entre acteurs d’un même service public.
Le renforcement des coopérations entre tous les acteurs est un levier majeur de l’amélioration des politiques publiques d’insertion sociale et professionnelle mais cela ne se décrète pas. Aujourd’hui, comme cela a été souligné par le rapport de l’IGAS sur le Contrat d’Engagement Jeune, toutes les conditions nécessaires à l’épanouissement du partenariat sont loin d’être réunies. Les opérateurs sont soumis à des injonctions contradictoires. D’un côté, on les enjoint à davantage collaborer, de l’autre, on cultive une forme de concurrence dans la mobilisation des publics ou via les appels à projets. Pour sortir par le haut de cette situation mal vécue par les deux opérateurs, l’Union Nationale des Missions Locales est convaincue que le Contrat d’Engagement Jeune doit être confié aux Missions Locales.
6. Un GIP « Réseau France Travail » pour associer l’ensemble des parties prenantes pour porter collectivement les communs numériques et méthodologiques, et l’académie France Travail.
Le rapport prévoit la co-construction par les Missions Locales, en tant que parties prenantes du réseau France Travail, des communs méthodologiques et numériques et des orientations stratégiques relatives aux jeunes. Ce sont aujourd’hui les modalités concrètes d’association qui doivent être éclaircies pour que l’ensemble des membres du réseau France Travail puissent en être de véritables parties prenantes. Le réseau des Missions Locales propose pour répondre aux enjeux de bonne gouvernance des communs « France Travail » que soit constitué un Groupement d’Intérêts Publics. Une structure ad hoc, sous forme de GIP, permettrait une réelle gouvernance collective, dans un cadre formalisé, garantissant la bonne prise en compte les spécificités de chacun. Les communs ne se décrètent pas, c’est la communauté d’usage, en l’espèce le réseau France Travail, qui doit le décider.
7. Conforter le rôle central du réseau des Missions Locales en lui confiant l’élaboration des orientations stratégiques et l’animation des travaux du réseau France Travail, à tous les niveaux, concernant les jeunes.
Opérateur spécialisé de l’accompagnement des jeunes au sein du réseau France Travail, le réseau des Missions Locales, dont l’action et les fonctions ont été considérablement renforcées ces dernières années, dispose d’une expertise reconnue de tous sur les questions d’insertion sociale et professionnelle des jeunes. Le réseau France Travail a tout à gagner à s’appuyer sur ces expertises.
8. Clarifier les dénominations entre le réseau France Travail et les opérateurs qui le composent.
Le choix de recourir à la même appellation pour le réseau, les comités et le futur opérateur ne participent pas de la clarté de l’ensemble. En effet, nous mesurons dans nos différents échanges à quel point cela rajoute de la complexité alors que l’ambition affichée visait justement à rendre plus lisible l’écosystème des politiques d’insertion sociale et professionnelle. Il faudrait s’interroger sur ses enjeux de dénomination au regard de l’ambition affichée. Du côté des Missions Locales qui sont des structures bien identifiées des jeunes et du grand public, l’enjeu sera de faire vivre dans sa communication son appartenance au réseau France Travail sans remettre en cause leurs dénominations actuelles.
9. Garantir la dimension ascendante dans France Travail en confortant le rôle décisif des élus locaux dans l’adaptation et la mise en œuvre des politiques publiques nationales et territoriales d’insertion sociale et professionnelle.
Beaucoup s’inquiètent que la comitologie proposée ne laisse que peu de place à l’initiative et aux capacités d’adaptation et d’innovation pourtant essentielles pour répondre aux spécificités territoriales. Il s’agit de penser des cadres d’échange et de coordination fondés sur des ambitions communes qui encouragent et stimulent l’agilité et la créativité territoriales.
10. A l’instar du modèle des Missions Locales, il faut mettre la participation des publics au cœur de la définition et de l’évaluation de la stratégie proposée.
C’est pour répondre à ce défi que nous avons souhaité relancer les travaux de l’Institut Bertrand Schwartz qui va mener une recherche-action sur les enjeux de participation des jeunes et développer les Lab’expression qui visent à favoriser les prises de parole des jeunes dans le débat public.
11. France Travail nécessitera des investissements massifs et pérennes largement compensés par les coûts évités.
Nous ne pourrons être exigeants avec les personnes accompagnées qu’à la condition que le réseau France Travail soit exigeant avec lui-même sur la qualité des contenus et des modalités d’accompagnement proposés. L’insertion sociale et professionnelle durable des personnes éloignées de l’emploi générera assurément des économies en termes de prestations sociales et des coûts sociaux de prise en charge des différentes problématiques auxquelles elles sont confrontées. Les opérateurs et acteurs doivent disposer de financements pluriannuels avec une part variable limitée. En effet, les enjeux de pilotage stratégique et de bonne gestion des structures nécessitent de disposer de visibilité et de prévisibilité avec des financements pluriannuels pour consentir sereinement aux investissements et recrutements nécessaires.
Enfin, il est fondamental d’associer les partenaires sociaux à la gouvernance de France Travail et de confier les enjeux de formation et de montée en compétences des membres du réseau France Travail à Uniformation, l’OPCO de la Cohésion Sociale en associant les branches professionnelles des membres du réseau France Travail.