Publié le 26/02/2024

Un article d’Alexandra Turpin, diffusé avec l’aimable autorisation d’AEF

« Un dispositif pertinent pour une mise en œuvre perfectible » : la FAS (Fédération des acteurs de la solidarité) dresse un bilan nuancé du Contrat d’engagement jeunes et plus spécifiquement de son volet « Jeunes en rupture » lancé courant 2022. L’association a conduit un travail de recherche-action sur ce dispositif, en partenariat avec l’Ansa (Agence nouvelle des solidarités actives). Un bilan intermédiaire a été publié le 8 février 2024, tandis que les résultats définitifs sont attendus pour la fin de l’année.

Un cej dédié pour les jeunes les plus en difficultés

Le CEJ dans sa version dite classique va bientôt fêter ses deux ans, le 1er mars. Il s’agit d’un dispositif visant à favoriser l’accès à l’emploi et à la formation de jeunes via un accompagnement renforcé et une allocation mensuelle. Nouveauté, l’entrée dans le dispositif est conditionnée à la réalisation de 15 heures d’activités minimum par semaine. Afin de permettre aux jeunes les plus en difficulté d’y accéder, le gouvernement a proposé dans un second temps un volet spécifique appelé « Jeunes en rupture ». Des appels à projets régionaux ont été lancés à destination des associations accompagnant les jeunes les plus précaires. L’ambition est de les aider à lever différentes difficultés (mobilité, santé…) pour qu’ils puissent signer un CEJ dit classique.

Les investigations menées lors de la recherche-action (questionnaires, entretiens avec les porteurs, les Missions Locales et leurs partenaires, entretiens avec les jeunes, observations sur site) permettent de dresser un premier bilan du déploiement du CEJ-JR sur les 10 projets sélectionnés dans le cadre de ce travail, avec une première année de recul, explique la FAS.

« Une réponse pertinente »

« Le CEJ-JR apparaît comme une réponse pertinente face aux besoins de mobilisation et d’accompagnement renforcé de jeunes en rupture, cumulant des freins importants à l’accès à l’emploi », indique la conclusion du rapport. Les professionnels opérateurs du CEJ-JR font état de pratiques et postures professionnelles « qui s’adaptent aux besoins et à la temporalité des jeunes ».

Le dispositif permet aussi de créer ou de renforcer les coopérations entre acteurs. « Au travers de la mise en œuvre du principe de co-accompagnement, le CEJ-JR institutionnalise et légitime la place des porteurs de projets dans l’accompagnement des jeunes en complémentarité avec le travail des Missions Locales », souligne la Fédération.

« Il faut clarifier le pilotage »

Toutefois, le pilotage stratégique et opérationnel du CEJ-JR « gagnerait à être clarifié et renforcé pour garantir un bon déploiement du dispositif », en articulation avec la gouvernance du CEJ. « Ce pilotage doit servir la visibilité et lisibilité du dispositif, encore fragile, ainsi que la mise en commun des expertises, l’adaptation conjointe des pratiques et la construction d’outils supports de la coopération », précise le bilan.

L’association demande le soutien et le pilotage de l’État « nécessaire à la bonne coordination des acteurs permettant in fine, l’insertion sociale et professionnelle des jeunes ». Il doit s’appuyer sur une « communication nationale simplifiée » portant sur le cadre opérationnel : critères et modalité d’entrées en parcours, cadre du co-accompagnement avec les Missions Locales, modalités d’application des 15 heures d’activités… La FAS recommande, par exemple, de concevoir une « mallette pédagogique » à destination des lauréats et des conseillers en insertion professionnelle des Missions Locales, qui pourrait aussi servir la communication territoriale.

« La mise en œuvre du CEJ-JR vient amplifier les coopérations territoriales en faveur d’un accompagnement coordonné des jeunes », constate le bilan. Toutefois, le contexte de réponse à l’appel à projet, ne laissant aux candidats que quelques semaines pour déposer leur projet, « n’a pas permis (ou à la marge) de susciter de nouvelles coopérations ».

Co-accompagnement parfois difficile à déployer

Par ailleurs, le co-accompagnement entre porteurs et Missions Locales « peine encore à se déployer sur certains territoires ». La FAS pointe l’absence d’instructions sur les « modalités concrètes » de mise en œuvre mais aussi les cultures professionnelles « vues comme très différentes entre travailleurs sociaux et conseillers en insertion professionnelle ».

Comme le COJ il y a quelques jours, la Fédération appelle à élargir la cible pour toucher tous les jeunes qui en auraient besoin. Au départ, les associations ne devaient pas intégrer dans le dispositif des jeunes ayant eu des contacts avec le service public de l’emploi dans les cinq derniers mois. Cette exigence a été assouplie mais, d’après le COJ, elle demeure maintenue dans certains territoires. D’après la FAS, il faut réfléchir à inclure des jeunes qui ne sont pas « hors radars » mais pour lesquels « un accompagnement renforcé et selon une approche renouvelée apparaît nécessaire ».

En outre, la temporalité apparaît « insuffisante » : il faut du temps pour la levée de freins, souvent multiples, et pour la remobilisation des jeunes dans un parcours d’insertion. Certaines réponses « font défaut ». C’est le cas de la dimension financière. L’entrée en CEJ permet en effet de toucher une allocation. Mais la phase amont n’ouvre pas de droits spécifiques. Même constat pour d’autres freins. Sur plusieurs projets, les professionnels ne parviennent pas à apporter des réponses aux besoins des jeunes, notamment en matière de logement et de santé mentale,

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